Le mois dernier nous vous avions fait partager le petit échange qu’il y avait eu avec Masashi Kudo lors de la 16ème édition de Paris Manga. Aujourd’hui nous vous présentons une interview bien plus longue et instructive.
« Pour son édition d’octobre 2013, Paris Manga accueillait Masashi Kudo, entre autres character designer des séries animées Bleach et Maoyu, que nous avons pu rencontrer au fil d’une table ronde avec les médias Journal du Japon, Nihon no Oto et la Folie des Mangas. Compte-rendu.
Qu’est-ce qui vous a amené à travailler dans le milieu de l’animation ?
Masashi Kudo: Lorsque j’étais au lycée, un ami m’a proposé d’aller aux portes ouvertes d’une école d’animation. Une fois sur place, on a pu expérimenter un peu la création d’animation, ça m’a beaucoup plu, et j’ai décidé d’entrer dans cette école après le lycée.
Au fil de votre carrière, vous avez travaillé à divers postes. Auquel vous sentez-vous le plus à l’aise ?
Masashi Kudo: Quand on me pose cette question, j’ai pour habitude de répondre que chacun a ses particularités et entraîne ses plaisirs propres. De ce fait, il n’y a pas de poste que je préfère particulièrement.
Pour le chara design de l’anime de Bleach, en quoi a consisté votre collaboration avec Tite Kubo, l’auteur original ?
Masashi Kudo: Au départ, je lui ai proposé plusieurs dessins et esquisses, qu’il a tous vérifiés un par un avec précision et minutie, tout en me donnant des détails : mettre plus de muscles par-ci, adoucir le trait par-là…
Il m’est arrivé de passer des nuits à discuter avec lui, pour arriver au résultat escompté.
Quelles ont été les étapes de création du chara design ?
Masashi Kudo: Après avoir moi-même lu les tomes sortis et avoir reçu les épreuves de Tite Kubo, je tiens compte des nouveaux personnages apparaissant au fur et à mesure. Généralement, la lecture du manga me permet déjà de bien les assimiler, de bien les ressentir, je dessine alors des esquisses que j’envoie à Mr Kubo. Ensuite je retravaille les esquisses selon les demandes de Mr Kubo. A la fin, je prépare un ensemble de dessins pour les animateurs-clé, ceux-ci vont ensuite les retranscrire, avant de passer le relais aux animateurs. Le personnage est réellement terminé après que les animateurs l’ont animé.
Vous avez aussi réalisé le chara design de l’anime Maoyu, plus récemment. Quelles ont été les principales différences entre ce travail et celui sur Bleach ?
Masashi Kudo: Bleach se déroulant dans le Japon actuel, tout ce qui concerne l’ambiance ou les vêtements était assez facile à appréhender, car on pouvait s’inspirer de la réalité. Y compris pour la Soul Society, dont les membres ont eux aussi un côté très japonais. Dans ce cas précis, il s’agit de mettre de la fantasy dans du réel, ce qui permet de mieux peaufiner les détails.
Alors que dans le cas de Maoyu, on a un monde fantastique, qui pourrait se dérouler au Moyen-Âge vers les 14ème/15ème siècles, et avec des éléments ancrés dans la fantasy. Chaque pays a sa propre armure, son propre style graphique : là, il s’agit de mettre du réel dans de la fantasy.
Quand vous êtes au chara design, quelles sont les influences des autres postes que vous avez pu occuper auparavant ?
Masashi Kudo: Il n’y a pas vraiment d’influence, parce que chaque poste a ses propres attributions. Le poste de chara designer est un travail surtout visuel et plutôt personnel, alors que des postes comme animateur ou animateur-clé sont plus un travail de groupe, où il faut plus penser en équipe.
Au fil du temps, vous avez eu l’occasion d’expérimenter sur l’anime de Bleach d’autres postes que celui de chara designer : animateur-clé, animateur, storyboarder… Parmi tous les postes occupés, lequel avez-vous préféré ?
Masashi Kudo: J’ai de l’affection pour chaque poste que j’ai occupé, mais celui de chara designer est le plus difficile.
Vous avez aussi travaillé sur certaines adaptations animées de Hayate au poste de réalisateur. Comment s’est déroulé ce travail ?
Masashi Kudo: Ça a été une expérience plutôt courte, mais les discussions que nous avons eues avec l’auteur original, Kenjirô Hata, ont été assez profondes. On s’est réunis plusieurs fois dans des izakaya (bistrot typique du Japon, ndlr) pour avoir de longues discussions, parfois la nuit. Bref, ça a été un travail très intense, bien qu’assez court.
Pour vous, quel est le vrai travail d’un chara designer ? Est-ce plutôt d’adapter pour l’animation une œuvre déjà existante, ou de créer de nouveaux personnages pour une œuvre animée originale ?
Masashi Kudo: Personnellement, vu que j’aimerais créer ma propre œuvre, je dirais que le vrai travail de chara designer réside dans la création de personnages originaux.
Y a-t-il des modèles qui vous ont inspiré ?
Masashi Kudo: La personne qui m’a le plus influencé est sans doute Mr Noriyuki Abe, le réalisateur de Bleach, avec qui j’ai travaillé pendant huit ans. Il y a aussi Mr Komino, avec qui j’ai travaillé chez Artland. Mais la personne qui m’a le plus fasciné est Noboru Ishiguro, qui a travaillé sur Yamato et Macross.
Que pensez-vous de l’animation japonaise actuelle ? À votre avis, qu’est-ce qu’il faudrait lui offrir de plus ?
Masashi Kudo: Il y a aujourd’hui un nombre impressionnant d’œuvres qui sortent, mais l’augmentation d’animateurs ne suit pas la même cadence. Je pense qu’il faudrait rééquilibrer un peu la balance.
Finalement, dans votre carrière vos premières expériences de réalisateur sont récentes puisqu’elles datent de 2012 avec Hayate et Kyō no Asuka Show. Cela a été une étape importante pour votre carrière ? Avez-vous d’autres projets prévus au poste de réalisateur ?
Masashi Kudo: Il y a des projets, mais je ne peux pas en dire plus pour l’instant.
Est-ce votre premier voyage en France ? Qu’en pensez-vous ?
Masashi Kudo: C’est la première fois que je viens en France. J’ai toujours voulu y venir car ça m’intéressait de voir un pays doté d’une histoire si riche. Je pense que ça va m’influencer dans mon travail.
Aimeriez-vous vous essayer à des travaux autres que dans l’animation ?
Masashi Kudo: Non, pas particulièrement.
Remerciements à Masashi Kudo, à son agent et interprète Emmanuel Bochew, ainsi qu’aux autres médias présents pour cette table ronde et au staff de Paris Manga.»
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